C’est par l’observation, l’écoute, la recherche active des signes et des indices que l’on peut éventuellement dresser une liste de toutes les espèces qui habitent le boisé, que ce soit en permanence, ou pour une partie de l’année (les migrateurs).
Daniel St-Hilaire, professeur à La Cité collégiale et technicien de la faune, était conférencier invité à la soirée biodiversité de Boisés Est, mercredi le 15 mai dernier. Il a expliqué quoi observer et comment, aux membres de Boisés Est qui s’étaient réunis pour l’occasion à la Maison Tucker à Rockland, notre hôte et partenaire pour la soirée.
Par exemple, on retrouve sous les roches humides et les souches des amphibiens comme les salamandres. Des tortues se réchaufferont au soleil sur les rochers aux abords des étangs. On remarque facilement les grenouilles et les crapauds au printemps, lors de leurs saisons d’accouplement : ils sont assourdissants près des points d’eau. Ce qu’on prend pour des criquets en avril et en mai, sont réellement des petites grenouilles forestières qui s’époumonent en soirée, surexcitées par la saison des amours.
Mais pour distinguer les différents cris des rainettes et autres, on doit faire appel à un spécialiste de la faune.
Les serpents font aussi partie de cette biodiversité faunique. Et il y en a plusieurs espèces mais ils se font plus discrets que les grenouilles (ils ne chantent pas) et sont plus difficiles à voir. Lors d’un inventaire de biodiversité, les biologistes emploient une technique originale pour les identifier et en évaluer le nombre : ils placent des planchettes de bois pressé d’environ 25 cm par 25 cm avec du feuillage humide en dessous. Après quelques heures, ils soulèvent les planches et peuvent découvrir ce qui s’est caché en dessous. C’est comme multiplier des petits endroits où ils aiment se cacher.
Et puis, également au niveau de la faune, il y a aussi les nombreuses espèces d’oiseaux (jusqu’à 75 espèces, facilement) et de petits mammifères (la plupart nocturnes, sauf écureuils, tamias et marmottes) qui complètent le portrait de la diversité biologique du boisé. Ces petits mammifères et dans une certaine mesure les oiseaux, jouent un rôle primordial pour aider à disséminer les semences des arbres (pensons aux glands de chêne, faines de hêtre, ou noix de noyer) et arbustes de la forêt.
Sachant tout ce qui précède, comment un propriétaire de boisé pourrait-il favoriser davantage de biodiversité chez lui ?
Il y a évidemment le rôle essentiel que joue l’eau, préférablement sous forme de mare ou de petit lac, suggère M. St-Hilaire. Ça n’a même pas besoin d’être un étang profond et de caractère permanent. Selon l’expert, les petits étangs saisonniers – ceux qui s’assèchent en été – peuvent très bien convenir à la reproduction printanière des petits batraciens et salamandres, sans compter les tortues de tout acabit. Lorsqu’il finira par s’assécher, les petites grenouilles seront déjà passées au stade terrestre et n’auront plus besoin de nager comme têtards, explique M. St-Hilaire.
Si n’en existe pas du tout – ou pas assez – de petits étangs dans son boisé, rien n’empêche d’en faire creuser des peu profonds (ou de s’en creuser soi-même) dans des endroits bas où l’eau s’accumule naturellement.
On peut aussi favoriser certains oiseaux dans le boisé comme les perdrix, en évitant de broyer les branches après la coupe des arbres, et en plaçant ces branches plutôt en tas assez compacts.
La grande diversité des oiseaux contribue beaucoup à la biodiversité et à la santé « écologique » du boisé. Installer des nichoirs peut ainsi aider à favoriser la rétention de certains oiseaux dans le boisé, à condition que le diamètre d’ouverture, les dimensions et la hauteur du trou conviennent à l’espèce convoitée. Certains oiseaux nicheurs ont de si courtes pattes qu’ils ne peuvent pas facilement sortir de la boîte si le trou est trop haut !
En terminant, petite nouvelle pleine d’espoir entendue lors de la soirée : il paraîtrait que les pics-bois sont en hausse depuis qu’ils ont découvert les larves d’agrile du frêne qui creusent des trous sous l’écorce des frênes. Les pics seraient en mesure de faire baisser le nombre d’agriles qui émergent, mais pas de sauver les arbres déjà sévèrement endommagés. Comme quoi, la biodiversité peut être très utile, et le maintien d’un environnement sain et biodiversifié apporte bien des bénéfices !
Enfin, pourquoi la biodiversité est si importante – et pas uniquement pour la forêt – mais pour nous tous habitants du grand vaisseau Terre.
Les spécialistes de la question disent que toutes les espèces sont inter-dépendantes, qu’elles ont besoin les unes des autres pour survivre, et cela inclut aussi les humains. Quand des espèces disparaissent, c’est toutes les chaînes alimentaires qui touchaient ces dernières, les « inter-dépendances », qui sont dérangées et notre habitat s’appauvrit, s’expose plus facilement aux bouleversements qui ne manquent pas de survenir. Le filet de sécurité est plus ténu et on devient petit à petit plus fragile comme écosystème et comme espèce…