3 décembre 2010 — Valoriser les petites sections boisées de l’Est ontarien qui entrecoupent les vastes terres agricoles, c’est la mission qui a été confiée à Yannick Loranger, depuis peu à contrat chez Boisés Est et au Conseil de l’intendance environnementale de Prescott-Russell.
Yannick, ce jeune homme de 25 ans qui a grandi sur une ferme laitière de la région de New Liskeard – dans le moyen Nord de l’Ontario – est très loin du militant extrémiste. Au contraire, dira-t-il durant l’entrevue qu’il accordait, on a le droit de couper des arbres, et même dans certains cas une coupe plus sévère peut s’imposer, tant que cela se fasse dans le but d’améliorer le boisé et d’en tirer un revenu équitable.
Ce qui est important, c’est que toutes les actions que l’on pose dans le boisé soient faites dans le « respect de celui-ci et de la faune qui l’habite », explique Yannick. « On doit chercher à conserver l’intégrité du boisé, dit-il, que ce soit en favorisant la faune, ou en tirant de celui-ci un revenu commercial ».
On s’aperçoit rapidement que le technicien forestier se double d’un grand amant de la faune et de la chasse. Les deux font naturellement bon ménage ensemble, dit-il.
De l’aide pour rédiger son Plan d’aménagement forestier
Et la bonne façon de conserver l’intégrité est encore de faire un plan d’aménagement forestier pour son boisé. On peut en faire une bonne partie soi-même et se faire aider par un professionnel pour les parties plus techniques.
Yannick espère être bientôt certifié pour approuver les plans d’aménagement qui lui seront soumis pour inscription au PEFFA (Programme d’encouragement fiscal pour les forêts aménagées). Son rôle est d’expliquer les principes des plans d’aménagement, du PEFFA et de la certification, et d’aider un peu nos membres à en bénéficier. Il pourra aussi s’occuper d’acheminer à qui de droit, la demande d’allégement fiscal de l’imposition foncière du boisé.
Car un des grands avantages d’un plan d’aménagement, est de pouvoir se prévaloir d’une réduction jusqu’à 75% des impôts fonciers sur les boisés au travail sur lesquels on applique « une gestion durable », le même dégrèvement fiscal dont bénéficient les agriculteurs pour les terrains zonés agricoles.
C’est en quelque sorte une compensation pour le travail et l’investissement que représentent la préparation et la mise en œuvre d’un plan de gestion forestière.
Et tout cela se passe maintenant en français, grâce entre autres au travail soutenu de l’Association française des propriétaires de boisés privés de l’Est de l’Ontario (qu’on appelle familièrement : Boisés Est) et le soutien financier de la Fondation Trillium de l’Ontario.
Plus besoin de se casser la tête pour comprendre la documentation rédigée dans l’autre langue officielle. Tout a été traduit ou adapté en français, si bien que tout le processus de production d’un plan d’aménagement ou de demande de certification peuvent maintenant se faire en français. Et l’on a une personne ressource bilingue avec Yannick, pour les prochains 10 mois, qui maîtrise bien le jargon technique de ce domaine dans les deux langues.
Fixer ses objectifs personnels
Un plan d’aménagement, par où commencer ? Comme dans beaucoup de choses qu’on entreprend dans la vie, le point de départ est de définir ce qu’on veut faire avec le boisé pour les prochains 20 ans. Avec le plan d’aménagement, on n’est nullement obligé de virer notre boisé en un chantier d’abattage.
Au contraire, il y a de la place pour en faire un sanctuaire de paix, si c’est ce qu’on recherche, ou n’y faire que la récolte de son bois de chauffage. Ou encore si cela nous correspond, on peut pousser plus loin l’exploitation en y prélevant du billot commercial, selon certaines règles, que l’on pourra vendre ou transformer soi-même en bois d’œuvre à l’aide de sa petite scierie mobile ou en faisant appel à des entrepreneurs locaux.
Lors de la rédaction du plan, à la section 5, on a le choix d’indiquer ce qui est le plus important et le moins important en termes d’objectifs personnels pour son boisé. Est-ce que c’est la protection de l’environnement?
La production de produits de la forêt? L’investissement immobilier? Les loisirs ? La faune ? Ou enfin, l’appréciation de la nature? Et toutes les combinaisons possibles des 6 objectifs généraux précédents.
Améliorer le boisé
Dans la plupart des boisés de la région, les meilleurs arbres (les plus gros, les plus droits, ceux qui poussaient le mieux) ont été coupés et sont partis depuis longtemps. C’est l’effet pervers des coupes d’écrémage que l’on voit encore à l’occasion. En somme, on a appauvri génétiquement nos boisés sans s’en rendre compte, explique Yannick.
C’est pourquoi, il y a tout un travail d’amélioration à faire dans la région, souvent en favorisant les meilleurs sujets qui ne seront souvent pas à couper avant bien des décennies. On doit remonter la qualité du boisé, et ça prend du temps.
Bien des propriétaires ne verront peut-être pas le résultat de leurs efforts de leur vivant, mais leurs successeurs en bénéficieront.
Pour faire de l’exploitation commerciale, comme la récolte de beaux arbres, le propriétaire d’un boisé certifié devra alors se doter d’une prescription forestière, de la part d’un forestier professionnel. Celle-ci indiquera qu’est-ce qui pourra être récolté, de quelle manière et à quel moment, de façon à maintenir l’intégrité du boisé, l’aider à progresser et à respecter les arbres semenciers et les endroits particuliers de nidification d’espèces rares.
On pourra aussi recourir aux services d’un marteleur pour identifier les arbres spécifiques à récolter pour satisfaire la prescription. Des cours d’initiation au martelage (identification des arbres à couper, conserver, etc.) pourront être éventuellement offerts dans la région, si la demande est là.